Réaliser des points individuels réguliers avec ses collaborateurs est considéré à juste titre comme un des fondamentaux du management.  Alors pourquoi, dans tant d’entreprises, ces points n’ont pas lieu ? Plutôt que de s’épancher sur une prétendue incompétence des managers, je vous propose de partir leur point de vue, du point de vue de ceux qui « ne font pas ». Quelles sont leurs bonnes raisons de ne pas faire ?

 

1 – « Je n’ai pas le temps ! »

Si cet argument est parfois utilisé comme une mauvaise excuse, il est dans d’autres cas tout à fait recevable. Lorsqu’une personne manage en direct plus de 8 personnes, qu’elle est en outre investie de missions opérationnelles spécifiques (missions d’expertise technique ou gestion d’un portefeuille clients par exemple) et que l’aspect administratif de son rôle est chronophage, difficile de trouver de la place dans son agenda pour des réunions régulières avec les collaborateurs !

Nos pistes pour donner du temps aux managers :

#1 Limiter le nombre de collaborateurs par manager

#2 Affranchir les managers des responsabilités opérationnelles directes

#3 Alléger la charge administrative des managers

#4 Mettre en place des points courts (15 minutes)

 

2 – « Je n’en vois pas l’intérêt !»

Certains managers ne voient pas l’intérêt de points réguliers avec leurs collaborateurs : « Un ou deux entretiens par an, c’est bien suffisant ! »  Le réflexe pourrait être de se dire : « Voilà des managers bien peu compétents. » Mais interrogeons-nous d’abord sur le rôle de l’organisation dans la production de cette objection : « Je n’en vois pas l’intérêt ». Dans quelle mesure la valeur ajoutée et les comportements attendus des managers ont-ils été formalisés par l’organisation ? Dans quelle mesure ont-ils été communiqués et portés auprès de la communauté managériale ? Dans quelle mesure sont-ils pris en compte dans la gestion RH des managers ?

Nos pistes pour démontrer l’intérêt de ces points aux managers :

#1 Définir un référentiel de compétences managériales pour l’entreprise, en associant la communauté managériale à la démarche.

#2 Mobiliser ce référentiel pour le recrutement, l’évaluation, le développement et la reconnaissance des managers.

#3 Réaliser des enquêtes employés et en partager les résultats avec les managers : elles leur révéleront immanquablement que les membres de leur équipe attendent d’eux un accompagnement régulier.

 

3 – « Cela ne se fait pas chez nous ! »

Certains managers auraient le temps et l’envie de mettre en place ces points individuels réguliers, mais il leur reste un dernier obstacle à franchir : « Cela ne se fait pas chez nous !».

Difficile en effet d’innover et d’aller à contre-courant d’habitudes bien ancrées!

Nos pistes pour aider les managers à passer le cap :

#1 S’assurer que le top management montre l’exemple. « Si mon responsable prend l’initiative de me rencontrer individuellement pour échanger sur ma performance, mon engagement et mes compétences, pourquoi ne pas faire de même avec mes propres collaborateurs ? »

#2 Recruter une partie des managers en externe, dans des organisations où le manager joue culturellement le rôle de « coach » vis-à-vis de ses collaborateurs, afin de diffuser progressivement de nouvelles pratiques de management.

 

A l’heure actuelle, beaucoup de DRH souhaitent renforcer la culture du feedback dans leur organisation, en particulier entre les collaborateurs et leurs managers.  Et parfois leurs efforts se concentrent avant tout sur les outils : ils modifient le processus d’entretien, en institutionnalisant par exemple des points mensuels, ou encore ils mettent en place une application pour faciliter le feedback en continu. Je leur conseillerais plutôt de se concentrer sur deux axes : donner envie aux managers (cf. l’objection « je ne vois pas l’intérêt ») et faire évoluer les conditions dans lesquelles ceux-ci exercent leur rôle (cf. l’objection « Je n’ai pas le temps »). Les nouveaux outils deviennent alors des ressources à disposition de managers motivés et disponibles pour faire grandir au quotidien leurs équipes.

Olivier GOULAY, Consultant