L’idée que les soft skills comptent au moins autant que les hard skills fait globalement consensus dans l’univers du recrutement. Evaluer les soft skills d’un candidat, oui, mais lesquelles ? Voici trois approches possibles pour les sélectionner.
1 – Se centrer sur les compétences essentielles pour la réussite dans le poste
C’est sans doute la piste la plus évidente, et celle qui a eu jusqu’ici les faveurs de la fonction recrutement. Ce n’est pas pour autant la plus simple à mettre en œuvre, car la tentation du mouton à 5 voire 10 pattes, ou encore les divergences de point de vue en interne sur le profil recherché peuvent compliquer l’atterrissage sur les critères réellement clés pour la réussite dans le poste.
2 – Se centrer sur les compétences essentielles pour l’équilibre de l’équipe
Puisque la dimension collaborative du travail se renforce, il peut être pertinent de rechercher chez un candidat des compétences comportementales complémentaires à celles de l’équipe en place. Telle équipe est composée d’une majorité de « doers » ? Cela peut inciter à rechercher un candidat avec un profil de « thinker », pour aider ses futurs collègues à prendre du recul sur leur pratique et à innover. Telle autre équipe est sous la responsabilité d’un manager peu résilient ? Au-delà d’accompagner le manager concerné dans la gestion de ses émotions, pourquoi ne pas rechercher un candidat démontrant une forte solidité émotionnelle et qui pourra apporter de la sérénité à ses futurs collègues ?
A noter que cette deuxième approche peut aboutir à des conclusions très différentes de la première, en particulier dans les équipes composées de personnes occupant le même poste (par exemple une équipe de développeurs informatiques, ou de gestionnaires de paie). En effet, dans ce type d’équipe, les critères de nature à enrichir la diversité du collectif sont souvent des critères distincts de ceux requis pour réussir dans le poste concerné. A titre d’exemple, la rigueur étant au centre des qualités recherchées chez un gestionnaire de paie, il est fréquent qu’une équipe de paie soit composée d’une majorité de personnes rigoureuses. Dès lors, ce seront d’autres critères qui émergeront du travail d’un recruteur qui voudrait rendre l’équipe plus diverse (par exemple des qualités intrapreneuriales).
3 – Se centrer sur les compétences en adéquation avec la culture de l’organisation
Des organisations font le choix de positionner l’adéquation entre les skills du candidat et leur propre culture comme un critère fondamental d’appréciation des candidatures. On a vu ainsi fleurir ces dernières années dans les processus de recrutement des tests de fit culturel, qui constituent souvent un premier filtre pour trier les candidatures. L’idée sous-jacente à cette troisième piste est que l’on ne recrute pas tant pour un poste que pour une entreprise, et qu’il est donc judicieux d’apprécier en priorité les compétences comportementales qui résonnent avec les valeurs de l’organisation.
Trois approches, aux conclusions parfois contradictoires, pour sélectionner les compétences comportementales à évaluer chez un candidat… Alors, quel chemin suivre ? Si celui-ci est sans doute différent à chaque recrutement, j’ai tendance à donner la priorité aux compétences essentielles pour la réussite dans le poste, et considérer les compétences issues des deux autres approches comme des must have. Pourquoi ?
Car l’équilibre d’une équipe est en constante évolution, au fur et à mesure des départs, des arrivées et aussi du développement de chacun de ses membres. La recherche de l’équilibre de l’équipe est donc souvent un critère trop instable pour en faire la pierre angulaire des soft skills recherchées chez une nouvelle recrue. Bien entendu, plus l’équipe est stable, et aussi plus le contenu du poste pour lequel l’entreprise recrute est intrinsèquement dépendant des autres postes de l’équipe (c’est le cas d’un poste d’adjoint par exemple), plus il sera pertinent de mobiliser cette approche.
Quant à la culture d’une organisation, elle est souvent à géométrie variable d’une zone géographique à une autre et d’un business à un autre. Le risque est alors d’apprécier l’adéquation des compétences du candidat avec une culture d’entreprise globale fantasmée plus que réelle. Sans compter les effets néfastes pour la diversité et la performance qu’il y aurait à rechercher des candidats relevant tous d’un même moule. Cependant, plus l’organisation est petite et plus sa gouvernance est stable, plus sa culture sera ancrée. Dans ce type d’organisation, l’approche du fit culturel présentera une valeur ajoutée forte. Il ne s’agira alors pas tant de s’assurer que les préférences comportementales du candidat constituent l’incarnation parfaite des valeurs de l’organisation, que de vérifier que l’écart entre les deux n’est pas trop important.
Olivier GOULAY, Tailor H